Arte, tomes 1 Ă  5 - Kei Ohkubo


Mon avis : coup de đź’•

Genre : historique
Public : tout public
Statut de la série : en cours
Tomes parus en VF : 5
Tomes parus en VO : 7




Résumé éditeur 

Arte est une jeune fille de famille aristocratique qui vit à Florence lors de la Renaissance italienne. Elle est passionnée de dessin et peinture et rêve d'en faire son métier. Mais lors du décès de son seul soutien, son père, sa mère la somme de cesser cette activité pour se marier. Arte, bien décidée à prendre sa vie en main, se met en quête d'un atelier qui l'accepterait comme apprentie.


Si j'avais rédigé un premier avis à chaud sur le tome 1, j'ai eu envie de refaire un article plus construit sur ses différentes facettes après en avoir lu les 5 premiers tomes. 

Manga à la fois historique et féministe, sur fond d'amour de l'art, le titre fonctionne surtout grâce à son adorable héroïne. Et par là je n'entends pas "fille mignonne sans caractère", bien au contraire !

Un titre féministe


Évidemment, une jeune fille de la Renaissance qui veut vivre par ses propres moyens, dans un métier réservé - comme la plupart - aux hommes, provoque de vives réactions. Tout d'abord celles de sa mère qui veut la marier - ou lui propose le couvent en alternative -, celles des ateliers qui refusent de la prendre pour apprentie, celles de ses pairs... bref elle fait face à une véritable levée de boucliers.

Cependant, loin d'être découragée par cette hostilité, Arte est enragée. Car Arte est une jeune fille impulsive, mais aussi enthousiaste, persévérante et naïve. Elle est loin d'être parfaite, et tant mieux, cela la rend plus humaine, mais sa détermination est une source d'inspiration. Si lumineuse qu'il est difficile de ne pas l'adorer, elle porte sur la vie un regard rafraîchissant et sans préjugés de classe sociale ou de genre.

Son chemin croise celui de Leo, maître peintre, bourru mais juste, le premier à voir en elle une personne plutôt qu'une femme, à reconnaître le travail et les compétences plutôt que la détermination de sa naissance.

À travers le combat d'Arte, l'intrigue nous dépeint la place des femmes dans cette société. Celles qui sont indépendantes sont rares, doivent être fortes et prouver plus encore leur valeur que les hommes. Veronica, la courtisane en est l'exemple, et devient une aide pour Arte, en lui laissant accès à ses nombreux livres et apportant son expérience. Les couturières, les nobles destinées à se marier, les filles de familles modestes incapables de procurer les dots, les veuves, les prostituées... toutes ces figures féminines croisent aussi le chemin de l'héroïne et enrichissent ce tableau.

Les préjugés sont eux aussi dépeints avec plusieurs visages : l'hostilité en est une facette évidente, mais le sexisme bienveillant n'en est pas moins un frein à l'évolution de la jeune fille (je vous invite d'ailleurs à lire cet article sur le sujet). Cet aspect est symbolisé par la relation d'Arte avec son collègue Angelo. C'est un garçon prévenant et même adorable, seulement il pense que les femmes sont des êtres fragiles qu'il a le devoir de protéger. Ce qui ne fait qu'ajouter de l'huile sur le feu de rage qui couve en Arte.

Car la jeune fille ne veut pas de complaisance à son égard : elle veut être traitée comme une personne capable et autonome, responsable de ses propres erreurs, mais aussi de ses succès, sentir qu'elle est capable de s'améliorer.

Être traitée comme une égale en somme.

L'idée étant encore révolutionnaire pour certains esprits étroits au XXIème siècle, Arte bouscule évidemment ses contemporains. D'autant qu'elle même, de naissance noble, éprouve un respect sans réserve pour les personnes qui mettent leur coeur dans leur travail et possède un véritable savoir-faire, sans se préoccuper de leur classe sociale. Du boulanger, à la courtisane, au marchand en passant par les couturières, ou même aux nobles avec une passion "indigne de leur rang", à travers le bel enthousiasme de la jeune fille, Arte est plus qu'un manga féministe : un véritable appel à ne pas laisser notre naissance déterminer qui nous sommes.


Un titre historique


Arte n'est pas un manga historique au même sens que Cesare : vous ne croiserez pas ici de grandes figures ou faits historiques, vous ne trouverez pas de dates. D'ailleurs on ne sait pas exactement quand se déroule l'intrigue, juste que les Amériques ont déjà été découvertes depuis quelques temps puisqu'on croise des légumes du Nouveau Monde dans un potager.

Cependant Arte propose une immersion dans l'époque de la Renaissance italienne. Grâce à un très joli coup de crayon - notamment sur les arrière-plans - et quelques points d'information, le lecteur est plongé dans la vie quotidienne de l'époque. Tous les aspects d'une civilisation sont abordés, de l'organisation sociale, en passant par la religion, les fêtes, les jeux, l'alimentation, la mode, l'architecture, les transports... rien n'est oublié. 

Les métiers et leur organisation en corporation et quartiers spécialisés sont également présents, avec évidemment un accent particulier sur le milieu des artistes. À travers le parcours d'Arte, nous suivons le fonctionnement de l'apprentissage du métier et ses multiples facettes. Les techniques de l'époque - tempera ou fresques par exemple - sont présentées au fil de l'histoire, ainsi que le rôle de l'art à l'époque. Les mécènes passaient en effet commande de tableaux pour des raisons qui allaient bien au-delà de l'esthétisme.


Ainsi, si Arte n'est certes pas un cours d'Histoire, ce manga présente un tableau extrêmement vivant de la Renaissance italienne, qui peut servir de support pour aborder cette période. C'est également une très belle leçon d'humanisme, à mettre entre toutes les mains sans hésiter.


Écrire commentaire

Commentaires: 0