Animé : The Tatami Galaxy


Mon avis : 💕

Genre : psychologique, romance, fantastique ? SF ? Inclassable ! 
Public : adulte
Statut : terminé 
Nombre d'épisodes : 11


Synopsis

Un jeune étudiant entame sa première année dans une université de Kyoto, l'ancienne capitale du Japon. Comme la plupart de ses camarades il entre dans un club de loisirs. Deux ans passent et un évènement étrange ramène l'étudiant à son entrée à l'université. Il profite de cette nouvelle chance pour choisir un nouveau club, vivre une nouvelle vie et faire de nouvelles expériences. Mais à la fin de cette nouvelle période, il est renvoyé à nouveau au début de sa scolarité et le cycle recommence sans fin. Fort heureusement il reste plein de clubs de loisirs à tester et tellement de nouvelles choses à vivre et revivre.



Voici un article qui a été complexe à écrire, tant l'animé l'est lui-même : The Tatami Galaxy est une bizarrerie inclassable mais profondément philosophique. Ne vous laissez pas abuser par le tag SFFF, ici le surnaturel n'est qu'un prétexte à une fable introspective autour des choix de vie et des regrets, dont je suis certaine qu'une bonne partie m'a échappée avec un seul visionnage.

J'espère donc ne pas en dire trop de bêtises en attendant de le revoir plus tard. Pour aujourd'hui voici un petit point sur les éléments qui en font toute la richesse, histoire de vous donner envie de vous y intéresser !

Personnages


Si à chaque épisode le héros fait des choix différents, avec des conséquences différentes, quelques personnages reviennent presque à chaque fois. Et eux empruntent souvent des voies assez semblables d'une "vie" à l'autre, contrastant avec l'indécision du protagoniste.


"Watashi"

Le héros et narrateur, dont on ignorera le nom jusqu'à la fin, ne se présente jamais. Ses compagnons ne le nomment pas non plus, ou alors senpai (titre honorifique pour les étudiants / collègues plus âgés), ce qui ne nous avance guère. Et qui n'a en fait aucune importance : je me suis rendue compte de cet état de fait en lisant une remarque de quelqu'un à la fin du dernier épisode tellement ça m'avait échappé ! Il est donc surnommé watashi ("je" en japonais).
Watashi est étudiant à l'université de Kyoto, rêve d'une "vie universitaire en rose", concept assez flou qui implique des centaines d'amis, une romance avec une "jeune fille aux cheveux noirs" indéterminée et une reconnaissance sociale, et ce but guide chacun de ses actes. Oui mais voilà, en chemin il se plante, jalouse son entourage et fait des choix discutables qu'il ne cesse de regretter, sans en endosser la responsabilité pour autant.


Ozu

Le second personnage principal est Ozu. Décrit comme un être proche du yokai (esprit ou monstre japonais), il a en tout cas la tête de l'emploi : teint vert, dents pointues, traits à la limite de l'humanité. Ce personnage est le plus intriguant et, à plusieurs reprises, on se questionne sur sa véritable nature - est-il humain ? Vraiment un yokai ? Une allégorie ? -, ainsi que sur la relation qu'il entretient avec notre héros. Ses actes semblent toujours pousser ce-dernier sur la mauvaise pente, mais... est-ce vraiment le cas ? Est-il un ami ou l'instigateur de la chute de Watashi ?
Une seule certitude en tout cas : Ozu est une constante dans la vie du héros. Il semble dans tous les mauvais coups, manipulant dans l'ombre, mais au profit de qui ou quoi ?


Akashi

Intérêt romantique du héros, symbole de son indécision et de ses erreurs, Akashi est finalement le personnage qui semble le plus normal au milieu de tous ces excentriques. Avec son caractère un peu brut de décoffrage, son intelligence d'ingénieure, ses pieds bien sur terre, elle est complètement hermétique à tout ce qui entre dans le concept de "vie en rose" du héros : en quelque sorte, elle représente une réalité bien tangible, opposée au rêve illusoire qu'il poursuit.


Les autres personnages récurrents comportent :
- un étudiant multi-redoublant considéré comme un maître (de quoi, bonne question), voire un dieu matrimonial dans l'épisode 1, et qui a effectivement une forme de sagesse à sa façon tordue ;
- un étudiant narcissique aux fantasmes particuliers ;
- une assistante de dentiste pleine d'entrain qui réagit bizarrement à l'alcool ;
- une vieille diseuse de bonne aventure ;
- un cowboy qui représente la libido du héros ;
... et quelques autres personnages secondaires tous plus ou moins barrés ! Quand je vous dis qu'Akashi est la plus normale !


Narration


La narration est ce qui fait toute la bizarrerie et la force de The Tatami Galaxy. Frappante dès les premières secondes, on a à peine le temps de reprendre son souffle dans le débit de parole de Watashi, surtout si comme moi vous le regardez en VOST. Je n'avais même pas lu le synopsis, aussi arrivée à la fin de l'épisode 1, ma réaction a été : "Wow. Euh. OK.", suivis de "Mais maintenant il va faire quoi ?"

Mais avec ce principe de retour dans le temps, une forme de répétition se met en place, permettant de mieux suivre les tribulations et états d'âme du héros. Et le scénario joue avec ce principe, que Watashi ne perçoit pas, sauf vaguement à quelques moments de déjà-vus (au passage, le mot "déjà-vu" est le même en japonais, incroyable non ?). Il se crée alors parfois un comique de répétition, parfois une mise en perspective plus sérieuse, mais toujours une attente du spectateur : qu'est-ce qui va changer cette fois ? Peu à peu on attend de savoir si le héros va finir par sortir du cercle vicieux répétition / erreurs / regrets et surtout comment. Ce sentiment m'a rappelé ma découverte du film "Un jour sans fin" (excellent au passage) dans lequel Bill Murray revit le même jour des centaines de fois.

La seconde particularité du déroulement de l'histoire est d'être complètement narrateur-dépendante : ce n'est pas la réalité de ce monde qui nous est montrée, mais celle perçue par le héros. C'est là que le graphisme très particulier de cet animé entre en jeux, venant en appui narratif lui aussi. Dans un style très pop et coloré - qui m'a un peu évoqué celui de Yellow Submarine (en plus moderne) par moment -, le côté parfois très "cartoon" accentue une émotion, une façon de voir du narrateur. La réalisation n'hésite pas à jouer sur les contrastes, opposant les rêves roses (littéralement donc) à une certaine réalité en teintes de gris, où les images filmées se mêlent aux dessins.


Thématiques


Avec chaque nouveau choix, notre héros intègre un nouveau club universitaire, se lance dans une nouvelle activité, rencontre de nouvelles personnes, et le tout est généralement plutôt - voire complètement - loufoque ! Chaque "vie" devient une expérience parfois totalement WTF, souvent hilarante, mais rarement dénuée de réflexion.

À travers cette intrigue touffue, The Tatami Galaxy parle de passage à l'âge adulte : de la perte des illusions irréalistes, à l'éveil à la sexualité, en passant par la relation aux autres et la découverte de soi. Watashi passe son temps à poursuivre des chimères et blâmer son entourage pour sa vie misérable, mais il n'y a qu'une personne que l'on peut changer : soi-même. Le spectateur voit comme le nez au milieu du visage ce qu'il devrait faire, la diseuse de bonne aventure le lui répète assez, les autres personnages également à leur façon, mais notre héros est soit trop aveugle, soit trop lâche pour agir. Plutôt humain pas vrai ?

À travers les clubs plus ou moins officiels - voire franchement clandestins - The Tatami Galaxy offre également des critiques de société. La plus frappante est celle des sectes dont le mécanisme est assez bien démonté via le regard de Watashi qui ne peut s'intégrer à cette pensée unique. S'il le regrette parce qu'il n'obtient pas sa fameuse "vie en rose", le spectateur se prend au contraire de sympathie pour son recul sur l'effet de groupe. Ce n'est pas la seule fois d'ailleurs, car si notre héros aspire à une reconnaissance sociale, suivre un mouvement sans réfléchir est en réalité contraire à sa personnalité.


Il y aurait encore tant à dire sur cet animé profond, destiné à un public adulte par sa complexité et ses thématiques, notamment sur les symboliques plus ou moins évidentes qui le composent. Peut-être qu'après quelques visionnages supplémentaires j'arriverais à (presque) tout saisir et analyser, il est certain qu'une seule fois est insuffisant. D'autant que la conclusion de l'animé remet pas mal de choses en perspective, emboîtant alors toutes les pièces du puzzle.

Je ne suis pas sûre que The Tatami Galaxy puisse plaire à tous, mais si comme moi vous aimez les histoires bizarres mais brillantes à l'esthétique unique, donnez une chance à cette petite pépite !

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